Accueil

Le mot du Président

Bertrand Debono élu Président le 6 juin 2025

 

Chères amies, chers amis de la SFCR !

Il y a déjà 365 journées fugaces que Cédric Barrey a transmis la présidence à Vincent Fière lors du congrès de Montpellier. Comme tous mes prédécesseurs, j’éprouve ce mélange d’enthousiasme et de frustration : un an passe si vite quand on veut servir notre communauté.

Les présidents passent, la SFCR demeure. Notre société se transforme, se rajeunit, mais garde la même passion : faire avancer la chirurgie du rachis pour le bien de nos patients.

Née de la rencontre d’orthopédistes et de neurochirurgiens, hospitaliers comme libéraux, la SFCR vit de l’échange, parfois de la contradiction, toujours de l’amitié, de la créativité et du savoir partagé. Que la présidence tourne et que les influences se croisent garantit la vitalité de cet esprit.

Quel enrichissement d’entendre, hier encore, Pierre Roussouly condenser des millions d’années d’évolution vers la bipédie, ou le Pr Jean Régis, expert du gamma-knife, détailler à Amiens la radiochirurgie des tumeurs rachidiennes ! Ces voix, cette diversité, voilà l’ADN de la SFCR.

Depuis ma thèse en 2000, notre discipline a été bouleversée. Nous avons adopté les techniques mini-invasives et la navigation, l’endoscopie, la robotique, mais aussi des concepts théoriques comme l’analyse fine des paramètres spino-pelviens, la RAAC, la préservation du mouvement, la réalité augmentée. Aujourd’hui, l’intelligence artificielle et le machine-learning accompagnent déjà la planification, le geste et le suivi pré- et postopératoire.

Ces progrès techniques s’accompagnent d’une évolution tout aussi rapide de nos schémas organisationnels : autant de champs où nous devons rester pionniers pour garantir au patient un parcours fluide et sécurisé.

Pourtant, deux questions fondamentales demeurent : qui doit-on opérer ? et qu’est-ce qu’un bon résultat ? Les réponses ne sont pas absolues, mais, collectivement, nous les affinons pas à pas.

Nous sommes la SFCR. Notre noblesse ne tient pas seulement à nos gestes, mais à notre finalité : soigner, éclairés par la science, soutenus par des standards exigeants et enrichis par nos échanges.

Nous sommes aussi nos équipes : infirmiers et IBODE des blocs, personnels hospitaliers, kinésithérapeutes, ingénieurs des laboratoires, équipes administratives et de recherche. Tous ne sont pas chirurgiens, mais tous font vivre la chirurgie du rachis.

Nous sommes la science : hypothèses, analyses, résultats significatifs ou non. Nos registres multicentriques, essais randomisés, tables rondes et communications – dont beaucoup plus mériteraient publication – nourrissent la prise de décision, toujours complexe dans notre spécialité.

Nous sommes aussi nos partenaires industriels, qui soutiennent nos congrès, participent à notre formation et conçoivent avec nous techniques et implants, souvent exportés alors qu’ils ont vu le jour en France. On parle parfois de « conflits » d’intérêt ; je préfère évoquer des liens assumés, moteurs de progrès.

Nous sommes les héritiers de pionniers tels que Jean Dubousset, récemment disparu, et d’une longue lignée qui remonte jusqu’à Nicolas Andry. Grâce à eux, nous voyons plus loin et gardons le cap d’une innovation responsable.

Nous ne sommes pas qu’un cercle savant ; nous sommes un réseau d’amis et d’alliés. Ensemble, nous inventons, réfutons, formons et transformons ; nous faisons passer les idées du laboratoire à la salle d’opération.

Nous sommes enfin les épaules sur lesquelles se hissent les plus jeunes. Notre devoir est de les pousser plus haut et plus loin, même s’ils n’attendent souvent pas qu’on leur ouvre la voie ; ils portent déjà des projets audacieux, des approches hybrides et une vision ouverte sur le monde.

Je suis honoré de prendre cette présidence à Nancy, aux côtés de Nasser Mansouri, représentant d’une nouvelle génération de neurochirurgiens du rachis. Dans cette ville, la cheffe du service de neurochirurgie est Sophie Coulbois, première femme présidente de la SFNC, et notre amie Marjory Rué préside les neurochirurgiens libéraux tout en étant secrétaire de la SFCR. Cette mixité illustre l’ouverture de notre société ; j’attends avec impatience la première femme présidente de la SFCR !

Un mot de gratitude pour celles et ceux qui ont marqué mon parcours : Pascal Sabatier et Olivier Hamel pour les années inspirantes aux Cèdres ; Christian Espagno, qui m'a ouvert des horizons inespérés en me faisant venir à Toulouse ; Richard Assaker, moteur de la révolution mini-invasive ; Jean-François Lepeintre, que j’ai rejoint à Versailles ; Guillaume Lonjon et sa communauté, qui m’invite à intégrer une pensée scientifique dans mes atermoiements anthropologiques ; et enfin Joël Delecrin, compagnon de six ans de commission scientifique et président potentiel légitime.

Ils sont la SFCR, tout comme Anne Capelle, qui veille sur nos réunions, nos ateliers, notre congrès et la bonne marche de notre maison commune.

Telle est la SFCR : ancrée dans son héritage, remettant sans cesse en jeu son excellence, intégrant les innovations pour en faire les standards de demain.

Pour cette année trop courte, je propose trois priorités :

  1. Soutenir la formation des jeunes en facilitant leur participation aux congrès, ateliers et modules de simulation indispensables.
  2. Renforcer l’esprit critique en donnant plus de place à l’analyse de la littérature, aux biostatistiques et à l’éthique de la recherche lors de nos réunions.
  3. Accroître notre rayonnement international en développant la commission dédiée, en tissant des liens durables avec Eurospine, AO, ESUBE, et en invitant chaque année un pays à notre congrès d’été.

Pour conclure – et sans cuistrerie –, je me tourne vers Aristote. Il nous invite à la phronesis (φρόνησις), cette sagesse pratique qui met en dialogue les moyens et la fin : l’art, pour nous chirurgiens, de prendre la décision juste.

C’est ce que je souhaite à chacune et chacun d’entre nous. L’avenir est à nous ! Excellente fin de congrès, bel été et année fructueuse au sein de la SFCR.

Merci encore de l’honneur que vous me faites !

Bertrand Debono

Président